
Artiste peintre de 26 ans, Enzo Roulleau-Bret développe une pratique picturale singulière où la peinture n’est pas un simple médium, mais bien le cœur même de sa recherche. Sa démarche témoigne d’une fascination pour le football. Ce sport l’absorbe tout entier, tout comme il s’absorbe dans la peinture, avec la même intensité physique et émotionnelle. Chaque résidence devient un entraînement, chaque exposition, un match à jouer, un terrain d’expérimentation où il pousse sans cesse ses propres limites.
Son travail prend appui sur un corpus d’archives personnelles : photographies de proches, scènes de la vie quotidienne, souvenirs de stades, objets collectés qui empruntent à l’imaginaire du sport (maillots, ballons, écharpes). Ces éléments nourrissent un univers où la mémoire personnelle se tisse avec la mémoire collective.
À l’instar de Beckmann, il utilise des couleurs vives et cherche des contrastes forts. Influencé par Manet, la matière est fouettée, et le coup de pinceau manifeste. Sans esquisse préparatoire, le rapport à la toile est direct. La toile nue, des coulures, des épaisseurs sont toujours laissées à voir et révèlent ainsi les strates de la création et les différents états de la peinture.
Pensées comme des scénographies immersives, ses œuvres transforment le spectateur en supporter, convoquant une ferveur partagée, une énergie collective. Le public est invité à entrer dans un univers où l’intime et le collectif dialoguent, se superposent, parfois se confondent.
L’exposition Salon<->Tribune prend la forme d’une rétrospective fragmentée, déployée en deux temps : d’abord l’espace du salon, de l’intime, du domestique — ensuite, celui de la tribune, du terrain, du collectif. Ce parcours compose un va-et-vient entre mémoire personnelle et récit partagé. Enzo Roulleau-Bret s’y positionne en témoin sensible d’une époque où le privé s’expose, où les émotions individuelles deviennent terrain commun. À travers ses peintures, il réunit des fragments d’expériences pour en faire une narration collective, une mémoire à la fois singulière et universelle.